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Va,

Le Roi. (Le congédiant du geste) Olivier, laisse-moi arranger les choses. (Olivierle-Daim sort)... Loyse! Te voilà, ma mie! Pourquoi rester, là-bas! Est-ce que je te fais peur?... Viens. Mais je ne vois pas ta tante... Venez-là, mes amis, près de moi. Toi aussi, Gringoire. Il y a quelque chose a terminer ici en famille. ( Gringoire) Eh bien, mon maître, j'espère que tu as su te faire heureux! Oui, je suis sûr que ma filleule aura apprécié l'homme que je lui offrais. . . . N'est-il pas vrai, Loyse?

Loy. (Feignant malicieusement d'être distraite) Quoi donc, Sire? De qui parlez

vous?

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ne puis épouser un inconnu . . . dont on n'a pas même voulu me dire le nom!

[Nic. (Au Roi) Ah! J'en étais sûre! il a été brave jusqu'au bout.

Loy. Je savais bien qu'il était en danger!] Le Roi. ( Loyse) Gringoire ne t'a pas 720 dit qu'il avait offensé le Roi son seigneur en composant une certaine . . . BALLADE DES PENDUS, et que pour racheter sa vie.

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Loy. (Devinant) Il devait en une heure, en un instant.

Nic. Se faire aimer de toi!

Loy. (Poussant un grand cri de joie) Ah! (Allant à Gringoire qu'elle prend par la main) Sire, je vous demandais ce matin un époux capable d'une action héroïque, un vaillant qui 730 eût les mains pures de sang versé: eh bien ! le voilà, Sire. Donnez-le-moi. Je l'aime. C'est moi qui réclame votre parole, et je serai fière d'être sa compagne à toujours, dans la vie et dans la mort!

Le Roi. (Riant)... Et toi, Gringoire, qu'en dis-tu?

Grin. (Eperdu de joie) Sire? Elle ne rit

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DAVID AUGUSTIN DE BRUEYS

I. ACT I.-Scene I.

M. PATELIN.

(1640-1723)

L'AVOCAT PATELIN

M. Pat. (Seul.) Cela est résolu; il faut aujourd'hui même, quoique je n'aie pas le sou, que je me donne un habit neuf. Ma foi, on a bien raison de la dire: il vaudrait autant être ladre que d'être pauvre. Qui diantre, à me voir ainsi habillé, me prendrait pour un avocat? . . . Depuis quinze jours j'ai quitté le village où je demeurais pour venir m'établir en celui-ci, croyant d'y faire mieux mes affaires; elles vont de mal en pis. J'ai, de ce côté-la, pour voisin mon compère le juge du lieu; pas un pauvre petit procès. De cet autre côté, un riche marchand drapier; pas de quoi m'acheter un méchant habit. Ah! pauvre Patelin ! pauvre Patelin! comment feras-tu pour contenter ta femme, qui veut absolument que tu maries ta fille? Qui diantre voudra d'elle en te voyant ainsi déguenillé? Il te faut bien par force avoir recours à l'industrie. tâchons adroitement à nous procurer à crédit un bon habit de drap dans la boutique de M. Guillaume, notre voisin.

...

II. ACT II.-Scene 5.

VALÈRE, M. GUILLAUME.

Oui,

Ils sortent de la boutique, portant une table sur laquelle est une pièce de drap, et la mettent à côté de la boutique avec trois chaises, apportées par un garçon de boutique.

M. Guil. On commence à ne voir guère clair dans la boutique; exposons ceci un peu plus à la vue des passants. Oh! ça, Valère, je t'avais dit de me chercher un berger pour garder le troupeau dont la laine sert à faire mes draps.

Val. Est-ce, mon père, que vous n'êtes pas content d'Agnelet?

M. Guil. Non, car il me vole.

Val. Au contraire, mon père. Je vous assure. qu'Agnelet nous sert très-fidèlement. M. Guil. Oui, toi, mais non pas moi: car, depuis un mois qu'il a quitté le fermier avec qui il demeurait pour entrer à mon service il ine manque sixvingts moutons; et il n'est pas possible qu'en si peu de temps il en soit mort, comme il le dit, un si grand nombre de la clavelée.

Val. Les maladies font quelquefois de grands ravages.

M. Guil. Oui, avec des médecins; mais les moutons n'en ont pas. .. Enfin je l'ai pris sur le fait tuant de nuit un mouton; je l'ai battu, et l'ai fait ajourner aujourd'hui devant monsieur le juge. Mais je veux examiner un peu mieux la chose. Donne-moi mon livre de comptes. (Il s'assied.)

(Valère va chercher dans la boutique le livre de comptes, et le pose sur la pièce de drap.) M. Guil. C'est assez, laisse-moi. Si un sergent que j'ai envoyé quérir me demande, fais-moi appeler. Je resterai encore un peu ici, en cas que quelque acheteur se présente.

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...

M. Pat. Non, monsieur! je suis. M. Guil. (Regardant de côté) Une robe? Serviteur. le procureur donc? . . . M. Pat. Non, monsieur. J'ai l'honneur d'être avocat.

M. Guil. (De même) Je n'ai pas besoin d'avocat. Je suis votre serviteur.

M. Pat. Mon nom, monsieur, ne vous est sans doute pas inconnu; je suis Patelin l'avocat.

M. Guil. (De même) Patelin l'avocat? Je ne vous connais pas, monsieur.

M. Pat. (Bas, à part) Il faut se faire connaître. (Haut) J'ai trouvé, monsieur, dans les mémoires de feu mon père, une dette qui n'a pas été payée, et.

M. Guil. Ce ne sont pas mes affaires, je ne dois rien.

M. Pat. Non, monsieur; c'est, au contraire, feu mon père qui devait au vôtre trois cents écus; et, comme je suis homme d'honneur, je viens vous payer.

M. Guil. (En se levant du siège) Me payer? Attendez, monsieur, s'il vous plaît:

20

30

40

50

60

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une intelligence. .

M. Guil. Oh! monsieur. .

M. Pat. Avec une habileté merveilleuse.
M. Guil. Oh! oh! monsieur.

M. Pat. Parbleu, la couleur de ce drap fait 100 plaisir à la vue !

110

120

M. Guil. Je le crois; c'est couleur de marron. M. Pat. De marron! que cela est beau! Gage, Monsieur Guillaume, que vous avez imaginé cette couleur-là?

M. Guil. Oui, oui, avec mon teinturier.

M. Pat. Je l'ai toujours dit: il y a plus d'esprit dans cette tête-là que dans toutes celles du village.

M. Guil. (S'applaudissant) Ah! ah! ah! M. Pat. (En maniant le drap) Cette laine me paraît aussi bien conditionnée.

...

M. Guil. C'est pure laine d'Angleterre. M. Pat. Je l'ai cru. À propos d'Angleterre, il me semble, Monsieur Guillaume, que nous avons été autrefois à l'école ensemble? M. Guil. Chez Monsieur Nicodème? M. Pat. Justement. Vous étiez beau comme l'amour.

M. Guil. Je l'ai ouï dire à ma mère. M. Pat. Et vous appreniez tout ce qu'on voulait.

M. Guil. A dix-huit ans, je savais lire et

écrire.

M. Pat. (Touchant encore le drap) Tenez, j'avais justement dans l'esprit une couleur de drap comme celle-là: il me souvient que ma femme veut que je me fasse faire un habit; je songe que demain matin, à cinq heures, en portant vos trois cents écus, je prendrai peutêtre de ce drap.

M. Guil. Je vous le garderai.

M. Pat. (Bas, à part) Le garderai! ce n'est pas là mon compte. (Haut) Pour racheter une rente j'avais mis à part ce matin douze cents livres, où je ne voulais pas toucher; mais je vois bien, Monsieur Guillaume, que vous en aurez une partie.

M. Guil. Ne laissez pas de racheter votre rente, vous aurez toujours de mon drap.

M. Pat. Je le sais bien! mais je n'aime point à prendre à crédit. Que je prends de plaisir de vous voir frais et gaillard! Quel air de santé et de longue vie!

M. Guil. Je me porte bien.

M. Pat. Combien croyez-vous qu'il me faudra de ce drap. . : .

M. Guil. Il vous en faudra.... Vous voulez sans doute l'habit complet?

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M. Pat. Oui, très-complet, justaucorps, culotte et veste, doublés de même; et le tout 19 bien long et bien large.

M. Guil. Pour tout cela, il vous en faudra oui . . six aunes. Voulez-vous

que je les coupe, en attendant?

ant

M. Pat. (A part, avec chagrin) En attend (Haut) Non, monsieur, non; l'argent à la main, s'il vous plaît; l'argent à la main: c'est ma méthode. Combien, Monsieur Guillaume, me ferez-vous payer l'aune de ce drap?

M. Guil. Voyons. (Il regarde la marque) Un autre en payerait ma foi six écus: mais allons, je vous le baillerai à vous à cinq.

M. Pat. (A part) Le juif! (Haut) Cela est trop honnête. Six fois cinq écus, ce sera justement.

M. Guil. Trente écus.

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150

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M. Pat. (À part, avec chagrin) Le retour

...

(Haut) Non, non, non, ne détournez pas vos gens. Je n'ai que deux pas à faire d'ici chez moi. (Il veut prendre le drap; M. Guillaume le tient toujours.) . . .

M. Guil. Laissez-moi vous donner un garçon, qui me rapportera l'argent.

M. Pat. Eh! point, point, je ne suis point glorieux; il est presque nuit, et, sous ma robe (Il prend le drap, et le met sous sa robe) on prendra ceci pour un sac de procès.

...

M. Guil. Mais, monsieur, je vais toujours vous donner un garçon pour me. M. Pat. Eh! point de façon, vous dis-je À cinq heures précises, trois cent trente écus. Oh ça, il se fait tard. Adieu, mon cher voisin. (Voyant qu'il le suit) Eh! serviteur! (Il s'en va précipitamment.)

mon

M. Guil. Serviteur, monsieur, serviteur. (Il sort) Il s'en va, parbleu, avec drap; mais il n'y a pas loin d'ici à cinq heures du matin. Je vais demain chez lui, et il me payera, il me payera. Voilà, parbleu, un des plus honnêtes et des plus consciencieux avocats que j'aie vus de ma vie. J'ai quelque regret de lui avoir vendu ce drap un peu trop cher, puisqu'il veut bien me payer trois cents écus sur lesquels je ne comptais point; car je ne sais d'où diable peut venir cette dette. À la bonne heure! Oh ça! il s'en va nuit; et voilà, je pense, tout ce que je gagnerai d'aujourd'hui

Mais, voici, je crois, ce coquin d'Agnelet qui m'a volé mes moutons.

Agn. (Entrant, la tête enveloppée d'un linge) Bon vêpre, monsieur, et bonne nuit. M. Guil. Tu oses encore te présenter devant moi?

Agn. C'est, ne vous déplaise, mon bon maître, qu'un monsieur m'a baillé certain papier qui parle, dit-on, de moutons, de juge et d'ajournerie.

M. Guil. Tu fais le benêt: mais je t'assure que tu ne tueras jamais plus mouton ! qu'il t'en souvienne.

Agn. Eh! mon doux maître, ne croyez pas les médisants.

M. Guil. Les médisants, coquin! ne t'ai-je pas trouvé de nuit tuant un mouton?

Agn. Par cette âme! c'etait pour l'empêcher de mourir.

M. Guil. Le tuer, pour l'empêcher de

mourir ?

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de m'avoir assommé, comme vous voyez, et accordons-nous ensemble, si c'est votre bon plaisir.

M. Guil. Mon bon plaisir est de te faire pendre. Entends-tu ? [Il sort. Agn. Le ciel vous donne joie! (Seul) Il faut donc que j'aille trouver un avocat pour défendre mon bon droit.

M. Pat. (Entrant) Ah! ah! je connais ce drôle-ci. N'est-ce pas toi qui as fiancé ma servante Colette?

Agn. Oui, monsieur, oui.

M. Pat. Vous étiez deux frères qui je gar antis des galères; l'un de vous deux ne me paya point.

Agn. C'était mon frère.

M. Pat. Vous fûtes malades au sortir de prison, et l'un de vous deux mourut.

Agn. Ce ne fut pas moi.

M. Pat. Je le vois bien.

250

260

Agn. Je fus pourtant plus malade que mon frère. Enfin, je viens vous prier de plaider 270 pour moi contre mon maître.

M. Pat. Ton maître, c'est ce fermier d'ici près?

Agn. Il ne demeure pas loin d'ici, et je vous payerai bien.

M. Pat. Je le prétends bien ainsi. çà, raconte-moi ton affaire, sans déguiser.

Oh

me rien

Agn. Vous saurez donc que mon bon maître me paye petitement mes gages, et que, pour 280 m'endommager, sans lui faire tort, je fais quelque petit negoce avec un boucher, homme de bien.

M. Pat. Quel négoce fais-tu ?

Agn. Sauf votre grâce, j'empêche les moutons de mourir de la clavelée.

M. Pat. Il n'y a point là de mal: et que fais-tu pour cela?

Agn. Ne vous déplaise, je les tue quand ils ont envie de mourir.

M. Pat. Le remède est sûr. Mais ne les tues-tu pas exprès pour faire croire à ton maître qu'ils sont morts de ce mal et qu'il les faut jeter à la voirie, afin de les vendre et garder l'argent pour toi?

Agn. C'est ce que dit mon doux maître, à cause que l'autre nuit . . . quand j'eus enfermé le troupeau... il vit que je pris. . . un un. dirai-je tout?

29c

M. Pat. Oui, si tu veux que je plaide pour 300 toi.

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Agn. L'autre nuit donc, il vit que je pris un gros mouton qui se portait bien: ma fy, sans y penser, ne sachant que faire . je lui mis tout doucement... mon coutiau auprès de la gorge; (vite) tant y a que je ne sais comme cela se fit, mais il en mourut d'abord.

M. Pat. J'entends. Quelqu'un te vit-il faire

Agn. Mon maître était caché dans la ber

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