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Un jour ces jeunes gens eurent une bonne fortune. Aux côtés du Bâtonnier siégeait un illustre avocat américain. Si je vous dis que c'est un des hommes qui unissent toutes les grâces de la séduction à toutes les rigueurs du savoir, qu'il est en Europe, où il fréquente, l'un de ceux qui y prolongent avec le plus d'efficacité le rayonnement de votre vie intellectuelle, je serai, j'imagine, dispensé de nommer M. Georges Wickersham.

Il les écouta en connaisseur, il les apprécia avec son indulgence coutumière, il ne fit qu'un reproche: le silence du Bâtonnier. Il est dans ce concours l'un de ses privilèges.

Les victoires de ce concours, nous viennent dans l'allégresse de notre matin; elles gardent aux lointains de notre mémoire un charme unique. Je ne me reporte jamais sans émotion au temps où j'en connus la douceur, et mon jeune confrère M. Camille Bernard, qui les a connues après moi, bien après moi, rendrait un témoignage pareil.

L'un des emplois les plus utiles du temps pour un stagiaire est la défense des affaires où la gratuité est assurée aux plaideurs. L'extrême libéralité des lois a multiplié ces affaires. Tout homme poursuivi devant une juridiction répresssive n'a qu'à le demander pour avoir un défenseur: la gratuité est de droit dans les affaires d'accidents du travail et de pensions de guerre, elle est prodiguée aux plaideurs qui font la preuve ou donnent l'illusion de leur indigence. C'est par dizaines et dizaines de mille qu'il faut compter les procès confiés ainsi à des avocats le plus souvent stagiaires. Admirable école pour ceux qui demandent à la vie ses grands enseignements, et qui trouvent là l'occasion de compléter leur instruction, de préparer les lendemains de leur carrière, mais en se pénétrant en même temps du sentiment profond de la solidarité humaine.

Encore au stage, ou plus tard inscrit au tableau de l'Ordre, l'avocat est soumis à des règles professionnelles étroites, dont la rigueur ne paraît excessive qu'aux impatiences intéressées à ne les pas comprendre, mais dont l'expérience assure l'incessante justification.

Nos pères se sont fait de l'avocat une conception très particuliere dont j'ai essayé au Congrès de Winnipeg de definir brièvement l'originalité.

Ils ont cru que l'indépendance de l'avocat qui est, en tous pays, sa vertu primordiale, devait être rendue sensible à tous et à luimême par la prohibition de tout ce qui pourrait devenir une occasion de la limiter. Pour être pleinement indépendant il leur a paru que l'avocat ne devait pas avoir de comptes à rendre, et créer le principe même d'une action éventuelle contre lui devant les tribunaux.

Pour n'avoir pas de comptes à rendre, pour n'être pas sujet à une action judiciaire, il faut n'avoir accepté aucune obligation contractuelle.

Tout contrat à l'occasion de sa profession est donc interdit à l'avocat; poussant au bout la rigueur on lui interdira tout ce qui peut créer un lien de dépendance.

De ce principe découle logiquement que l'avocat ne peut être le mandataire de son client. Il ne peut donc l'engager, signer pour lui, traiter en son nom; par contre, il ne lui devra pas de comptes d'une gestion qu'il n'a pas assumée. Il le conseille, il le dirige, il l'oriente, il défend sa cause dans la pleine autonomie de sa conscience; il le fait comme il croit devoir le faire et nul ne peut lui demander compte en justice de la mission remplie.

De ce même principe découle que le mandat qu'il ne peut accepter pour une affaire, il n'aura nulle part le droit de le recevoir, il ne pourra par exemple devenir l'administrateur d'une société.

Il s'ensuivra encore qu'il ne peut y avoir d'association entre avocats-alors que, sous des principes différents, vous ne concevez guère la profession que sous cette forme.

Qui ne se lie pas par contrat n'a pas le droit de prétendre lier les autres; qui n'admet pas contre lui-même l'action en justice à l'occasion de sa profession, ne peut la mettre en œuvre. Nos règles interdisent à l'avocat la réclamation de ses honoraires devant les tribunaux.

Je n'insiste pas. Ajoutons seulement que pour assurer l'observation de ses devoirs l'avocat est soumis à l'autorité du Bâtonnier d'abord qui consacre tous les jours plusieurs heures à l'administration de l'Ordre, instruit et règle lui-même le plus grand nombre des affaires de discipline, et défère les plus graves au Conseil de l'Ordre. L'avocat cité devant ce Conseil y est entendu personnellement et peut se faire assister d'un de ses confrères. Les peines vont de l'avertissement à la radiation: pour les plus importantes, la décision du Conseil est susceptible d'appel devant la Cour.

Telle est, en quelques traits généraux, l'organisation de notre Ordre. Je n'enaurais rien dit si j'avais le prétention de vous faire entrer dans la pleine connaissance de notre vie professionnelle; j'en ai peut-être trop dit si je songe à l'aridité du sujet.

Aussi bien je ne suis pas venu apporter un enseignement, mais rendre un témoignage, celui de la fraternité qui unit le barreau de Paris aux barreaux d'Amérique, dans leurs conceptions différentes de l'organisation professionnelle. J'ai tenu à ce qu'il fut rendu devant vous par le chef de l'Ordre.

Il est émouvant de le faire dans cette ville de Détroit, fondée naguère par nos concitoyens, où les souvenirs de France surgissent d'eux-mêmes dans la mémoire, et dont la prospérité fabuleuse donne à l'histoire de son développement les magnifiques invraisemblances de la légende.

Il est émouvant de le faire sur cette terre de la loi, où quand il fallut prendre les tragiques résolutions, ce n'est pas aux imaginations que l'on crut utile de parler pour les entraîner dans un élan d'enthousiasme, ce n'est pas aux intérêts qu'on s'adressa en éveillant la crainte de ce qui les menaçait s'ils restaient inertes, mais il fut dit que le droit était violé, et le cri retentissant aux loitains du territoire suffit à y provoquer l'ébranlement des consciences.

Il'est émouvant de le faire devant ceux qui ont été dans ce culte du droit les éducateurs de la nation, devant ceux qui, demain dans le nouveau monde comme nous dans la vieille Europe, seront les ouvriers éphémères, mais incessamment remplacés, de la tâche éternelle de la justice, serviteurs inlassables et jamais découragés des deux grandes causes dont M. Hughes faisait l'autre jour une si saisissante apologie: "Liberty and Law."

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THE INNS OF COURT.1

I am called upon to speak to the Canadian Bar Association at what we shall all agree is a memorable meeting. I am not unaccustomed to following great leaders in the Courts. I have had the honour of following, as junior counsel, Lord Buckmaster himself, but I have never before had to follow three such speakers as I have to follow today, or three such speeches. Moreover, when one follows a leader in a law court, if the leader acquits himself as you think creditably, you have always the option, and an option which I think you will agree with me you ought always to take, of saying that you cannot usefully add anything. Unfortunately for me I am not able to-day to say to you that I cannot usefully add anything. I have had a command from your President that I should add something, and I must, as a loyal subject, obey.

There is one thing that I can add to what Lord Buckmaster has said, and although I have had no consultation with him upon the point, I feel sure that he will wish me to add it, and it is that on behalf of your English visitors I desire to thank you from the bottom of my heart for your great kindness and hospitality to us.

When I last had the honour of addressing the Canadian Bar Association in 1919, I was asked to do it as I was travelling across, after a period of enforced absence from the law, and accordingly I felt completely unable to discusss any legal subjects with the Canadian Bar Association, but I was able to tell them some of my personal experiences, and after all, one's personal experiences are really much more interesting than anything else. Since then my personal experiences-I do not wish to say have been humdrum, because they have been so largely concerned with Canadian cases-but I did not know on what subject it would be desirable to address you. When I received Sir James Aikins' cable asking me to speak, I felt inclined if it had not been too laconic to answer by cable, "What about?" But Sir James very kindly suggested to me a subject, and I found it not uninteresting to read about. The subject which I want to speak to you about today is the history of the Inns of Court. The history of the Inns of Court is really a history of our profession. It is a history of the administration of British Justice. As you know, the Inns of Court are called the Honourable Societies of

Address by the Honourable Geoffrey Lawrence, K.C., during the Annual Meeting of the Canadian Bar Association at Winnipeg in August, 1925.

the Inner Temple, the Middle Temple, Lincoln's Inn, and Gray's Inn, and I hope to be able to show you that in their origin, in their antiquity, and in their traditions they live up to that title.

I want also to show you, by reference to original documents, as far as possible, that we have as part of our traditions the traditions which have their roots in the Temple, where two of these Inns of Court are situated.

It is not uninteresting to see how people take on their colour from their environment, and sometimes they are able to give to a particular place something of their spirit. I think that in the Inns of Court you will find that the legal profession have taken from the place where they have been for so many centuries, something of the spirit of those who held it before them.

They hold the Temple, not as an inheritance, they hold it directly after the Knights Templars, who, as you know, were the founders of chivalry in Europe. I am not quite sure that the Knights Templars were devoted to learning, but I suspect they were devoted to education of a sort. They were certainly devoted to discipline, and they were devoted to hospitality, and the history of the Inns of Court will show you that the Societies of the Temple followed directly in those traditions which they inherited from the Knights Templars.

In talking to you about this history, it is inevitable that I shall have to trouble you with some dates, which, however, are not uninteresting in view of their antiquity.

The Temple Church was consecrated in 1185, and from that time onwards the Templars were there. When they were not at the Crusades they were training themselves for their knightly duties in the Temple, and extending knightly hospitality to the great ones of the world, and I have no doubt to all and sundry.

The origin of the lawyers' connection with the Temple arose out of these circumstances. In 1254, Pope Innocent IV. forbade the clergy, who were at that time the sole expounders of the law, to study the ancient customs of Great Britain. British men in those days, as in these, were just as tenacious of their ancient customs as are the people of Quebec to-day tenacious of their ancient law, for which I think every Britisher will respect them just as we respect our ancestors for their tenacity in refusing to be governed in those days long ago by the civil law.

In 1292, Edward I. granted a right of audience to certain laymen, only 140 in number, to be chosen from the whole of the counties. They were to promote and encourage the study of ancient municipal

2-C.B.R.-VOL. IV.

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