Imágenes de páginas
PDF
EPUB

On a retrouvé dans quelques îles de la mer du Sud l'usage des anciens Péruviens, de marquer les jours par des nœuds qu'on fait à des cordons de fil.

[ocr errors]

le

« La veille du jour où l'Oroolong (*) mit à la voile, » roi demanda le soir au capitaine Wilson dans combien de » temps le vaisseau pourrait être de retour à Pelew. Il lui répondit que ce ne serait probablement que dans trente » mois, et peut-être même dans trente-six. Abba-Thulle » tira de sa corbeille un morceau de ligne, y fit trente nœuds » à un petit iútervalle; ensuite il laissa un long espace, y ajouta six autres nœuds, et le serra: »

>>

[ocr errors]
[blocks in formation]

Les Incas se servaient d'un grand nombre de cordons de différentes couleurs, pour régler le paiement de leurs troupes et les dénombrements du peuple. On assure même que ces signes convenus pouvaient en partie remplacer l'écriture, et conserver le souvenir des actions mémorables et des grands événements.

21) PAGE 69 VERS 9.

Il dit, et, l'œil tourné vers la carte chérie,
Où l'art ingénieux lui traçait sa patrie,

Tantôt vers ces écrits, monuments de nos arts,

Tournant languissamment ses douloureux regards,

Il expire en sa fleur....

Lée-Boo mourut à Londres, de la petite vérole, le 27 đécembre 1784, chez le capitaine Wilson, qui lui prodigna

(*) Les Anglais donnèrent le nom de l'ile au petit navire qu'ils y avaient construit.

n

[ocr errors]

jusqu'à la fin les soins les plus tendres et les plus reconnaissants. Sa douceur, sa bonté, son empressement à s'instruire, l'avaient rendu cher à tous ceux qui le connaissaient. « C'est » une triste commission pour moi, écrivait le médecin qui >> le soigna dans ses derniers moments, que de vous informer » du destin du pauvre Lée-Boo. Il est mort ce matin sans » pousser un gémissement, la vigueur de son esprit et de son » corps s'étant soutenue jusqu'à la fin. Hier, le second » accès survenant, il fut saisi d'un frisson, auquel succé» dèrent un mal de tête et une violente palpitation, avec une grande difficulté de respirer. Il fit usage du bain chaud, qui, auparavant, lui avait procuré un soulagement passager. Il m'exprimait toutes ses douleurs de la manière la plus pa» thétique, mettant ma main sur son cœur, posant sa tête » sur mon bras, et m'expliquant sa difficulté de respirer : » mais lorsque je fus sorti, il ne se plaignit plus, faisant voir par-là qu'il ne se plaignait que dans la vue d'être soulagé, » et non pour attendrir; en un mot, vivant et mourant, il » m'a donné une leçon que je n'oublierai jamais ; et certai» nement, par sa patience et par sa force d'ame, il fut digne » d'être imité par un stoïcien. Je n'ai point vu le capitaine » Wilson ce matin; mais j'ai trouvé tous les domestiques en

>>

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

pleurs, et un air de tristesse sur tous les visages. Le carac» tère aimable du pauvre Léé-Foo l'avait fait regarder, par chaque personne de la famille, comme un frère ou un » fils, etc.... » La compagnie des Indes orientales lui fit élever un tombeau dans le cimetière de Rotherhithe. Ces détails m'ont paru nécessaires pour faire apprécier le fond historique de cet épisode, et ce qu'il doit à l'imagination du poète.

POËME.

CHANT DEUXIÈME.

L'HOMME SENSIBLE.

HEUREUX, disait Virgile, heureux l'esprit sublime
Qui peut de la nature approfondir l'abîme; (
Qui, combinant entre eux, les causes, les effets,
Sonde des éléments les principes secrets;
Qui sait pourquoi du jour s'éclipse la lumière;
Qui fait pâlir des nuits l'inégale courrière;
Comment la vaste mer, sans l'aide du trident,
S'enfle, couvre ses bords, et les quitte en grondant;
Et qui vait, des hauteurs de la philosophie,

Tous ces vains préjugés que l'erreur déifie.

Mais trop heureux aussi qui, modeste en ses chants, Sait peindre les travaux et les plaisirs des champs;

Et qui, n'osant du monde embrasser la structure,
Assis près d'un ruisseau, se plaît à son murmure.
Ainsi parlait Virgile: et moi, de qui la voix
Célébrait les jardins, les vergers et les bois,
J'oserai plus encore : plein d'une douce ivresse,
Ainsi que de Virgile, élève de Lucrèce,

De l'homme, cet abîme est sans bords et sans fonds,
Je vais développer les mystères profonds.

J'ai dit comment, des dieux parcourant les ouvrages,
Les sens dans notre esprit en gravent les images;
Par quel art, variant ses magiques reflets,
L'Imagination colore les objets,

Et puisant à son gré dans la riche mémoire,
De ce monde en roman sait transformer l'histoire.
Aujourd'hui je dirai nos peines, nos plaisirs;
Comment sont irrités ou calmés nos désirs;

Tout ce qu'ajoute aux biens, aux maux de la nature,
Ce pouvoir enchanteur, objet de ma peinture.

Heureux si ces trésors me sont encore ouverts,

Et

parent la raison du doux charme des vers! Vois comme l'Eternel d'une main avare,.

a,

Dispersé les plaisirs, comment il les sépare
Par des vides fréquents, où le désir trompé

Ne sait plus où se prendre, et meurt désoccupé;

Où notre œil n'aperçoit, de distance en distance, Que quelques points épars dans un espace immense. L'illusion accourt, et sa brillante erreur

Vient, d'un objet à l'autre, amuser notre cœur;
Près du bonheur qu'on eut met le bonheur qu'on rêve:
Dieu créa l'univers, l'illusion l'achève;

Où dort la jouissance elle éveille un desir,
Elle met le regret où finit le plaisir;
Et de vœux, de projets, d'espérances suivie,
Remplit le canevas des scènes de la vie.

En voulez-vous l'emblême ? Ecoutez ce récit :
Une femme charmante assemblait, m'a-t-on dit,

A de petits soupers, très grande compagnie;

De sa table frugale, et souvent mal servie,
Elle se plaignait seule, ou plutôt se moquait;
Mais si l'Aï, l'Arbois, ou le Bordeaux manquait,
Si les plats clair-semés se fuyaient sur la table,
Elle contait soudain la gaîté délectable
Se répandait partout, les ris gagnaient; le vin
Etait délicieux, et le souper divin.

[ocr errors]

Telle est l'illusion, au grand banquet du monde,
Où manque un bien réel la douce erreur abonde.
·Dans un espace étroit, et dans un temps borné,
Son magique pouvoir ne fut point confiné.

« AnteriorContinuar »