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Cultivez les arts enchanteurs ;.

Ils calmeront les maux où le ciel vous condamne; Ils mêleront quelque charme à vos pleurs.

Mais ne profanez point le feu qui vous anime;
Laissez là des plaisirs les chants voluptueux,
Et leur lyre pusillanime.

Célébrez l'homme magnanime,
Célébrez l'homme vertueux;

Et que vos sons majestueux
Soient sur la terre un prélude sublime

Des hymnes chantés dans les cieux.

ÉPITRE

A MADAME LA DUCHESSE DE DEVONSHIRE.

De vos riches tableaux que j'aime les images,

Quand vous peignez ces monts sauvages,
Noir séjour des frimas, d'où tombent ces torrents,
Où gronde le tonnerre, où mugissent les vents,
Sillonnés de ravins, entrecoupés d'abîmes!
Lorsqu'avec tant de grace, à leurs horreurs sublimes
Vous opposez leurs tranquilles abris,

Leurs doux ruisseaux et leurs vallons fleuris,
Le vrai bonheur, loin d'un luxe profane,

A leurs rochers confiant sa cabane,
Toujours la vérité dirige vos pinceaux ;
Vous unissez la force à la mollesse :

Le cours des fleuves, des ruisseaux,
Embrasse avec moins de souplesse
Le terrain varié que parcourent leurs eaux.
De la variété le mérite est si rare!

Toujours pour leurs Phaons soupirent nos Saphos;
Deshoulières m'endort aux chants des pastoureaux :
Prodigue des grands traits dont sa Muse est avare,
Mieux qu'elle vous savez varier votre ton;

Je crois voir, à côté de l'aigle de Pindare,
La colombe d'Anacréon.

Ainsi des saints devoirs et d'épouse et de mère,
Des Muses l'entretien charmant

Vient quelquefois doucement vous distraire:
A la raison vous joignez l'agrément,

Le talent de bien dire au bonheur de bien faire :
Telles naissent les fleurs au milieu des moissons.
Mais c'étoit peu pour vous de briller et de plaire:
A vos enfants vous transmettez vos dons.
De l'amour maternel tel est le caractère;
C'est dans ses tendres rejetons

Qu'est sa volupté la plus chère;

C'est dans eux qu'il jouit, c'est pour eux qu'il espère; Au milieu de ses nourrissons,

- Ainsi la rose, déja mère,

Que les zéphyrs trop tôt cédent aux aquilons,

Ne pouvant retenir sa beauté passagère,

Met son espoir dans ses jeunes boutons; Leur légue ses parfums,

parfums, sa grace héréditaire, Sa couronne de pourpre et ses riches festons. De vous, de vos enfants c'est l'image fidéle; L'aimable Cavendish, graces à vos leçons,

Est le portrait charmant du plus parfait modéle; Comme vous elle plaît, vous vous plaisez dans elle. Jouissez, reprenez vos aimables concerts:

Vos chants servent d'exemple aux nôtres; Et le plus dur censeur eût fait grace à mes vers,

Si j'eusse été plus tôt le confident des vôtres. de les aimer; encouragez les arts,

C'est peu

Belle GEORGIANA! c'est vous dont les regards,

La mémoire encor m'en est chère,

Ont les premiers, à ma Muse étrangère,
D'un accueil caressant accordé la faveur,
Et dissipé la crainte attachée au malheur.
Dans les champs paternels, jadis simple bergère,
Elle chantoit aux montagnes, aux bois;
Les bois lui répondoient; et même quelquefois,
Il m'en souvient, sa chanson bocagère
Sut se faire écouter dans le palais des rois.
Ce temps n'est plus: fugitive, exilée,

Sur les bords où chantoient les Popes, les Thompsons
Sa voix tremblante essaya quelques sons:

Albion lui sourit, elle fut consolée.

Tel un frêle arbrisseau qu'un orage soudain
Enlève et transporte sur l'onde,
Contraint de s'exiler sur quelque bord lointain,
Suit au hasard sa course vagabonde,
Rencontre, aborde une terre féconde;
Là, par Zéphire transplanté,

Bientôt l'arbuste acclimaté

Se croit dans son berceau : les enfants du bocage
Lui font accueil; il partage avec eux
Et la douce rosée et les rayons des cieux;
De sa fleur étrangère embellit ce rivage,
Bénit son sort, et pardonne à l'orage.

T. I. POÉS. FUG.

13

A M. DELILLE,

En lui envoyant le poëme du Saint-Gothard.

Vous dont la lyre enchanteresse
Unit la force à la douceur,

De la nature amant flatteur,
Vous qui l'embellissez sans cesse,
J'ose vous offrir, en tremblant,
De l'humble pré la fleur nouvelle ;
Je la voudrois une immortelle,
Si vous acceptez le présent.

GEORGINE DEVONSHIRE.

ENVOI

En retour de vos vers purs, nobles et faciles,
DEVONSHIRE, accueillez l'humble tribut des miens.
Les dieux sur nous épanchent tous les biens,
Les fruits, les fleurs et les moissons fertiles :
Pour s'acquitter, nos vœux sont impuissants;
Mais les dieux sont trop grands pour être difficiles:
Tout est payé d'un simple grain d'encens.

J. DELILLE.

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